Sécurité sociale: le nouvel accord France-Canada arrive au sénat

Le sénat devrait commencer à examiner en séance le nouvel accord de sécurité sociale le 19 février. Cet accord, issu de la visite de Jean-Marc Ayrault -alors Premier ministre- à Ottawa en mars 2013, devra remplacer celui de 1979, devenu obsolète.

Le texte de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées doit être distribué aux sénateurs ce lundi 16 février. Dans cette commission, présidée par Jean-Pierre Raffarin, siègent quatre des douze sénateurs des Français de l’étranger: Mmes Conway-Mouret et Garriaud-Maylam ainsi que MM. Cantegrit et Del Picchia. C’est du reste Hélène Conway-Mouret qui a été chargée du rapport sur le projet de loi, enregistré à la Présidence du sénat mardi 10 février. Ce rapport a été examiné dès le lendemain par la commission idoine.

La France et le Canada étaient déjà liés par un accord de sécurité sociale (conclu le 9 février 1979 et dont les modalités d’application étaient précisées par deux arrangements administratifs datés du 21 octobre 1980 et du 4 novembre 1980). La renégociation de ces textes a été décidée en 2002 pour trois raisons, indique le projet de loi déposé en juillet 2014: le besoin d’en actualiser le contenu, le souhait des Canadiens de rapprocher cet accord de ceux conclus avec d’autres pays, et la volonté de la France de mieux encadrer le détachement des travailleurs français*.

Lors de la signature de l’accord de 1979, par exemple, l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon était exclu. Désormais, les voisins du Canada seront considérés comme français à part entière.

La France est le 7e investisseur étranger au Canada: environ 550 entreprises y sont implantées, surtout au Québec. Elles emploient plus de quatre-vingt mille personnes, les entreprises françaises les plus importantes étant Sodexo (11 000 travailleurs), Lafarge (8 000) ou, moins évident, Michelin (tout de même 4 500 employés). De son côté, Total a entrepris un programme sur les sables bitumineux de l’Alberta, tandis qu’Areva est le deuxième exploitant de l’uranium de la Saskatchewan.

Pour sa part, le Canada est le 11e pays investisseur en France, avec plus de dix mille employés dans plus de 500 entreprises détenues par 115 groupes. Le secteur des logiciels et prestations informatiques est le premier secteur d’investissement des entreprises canadiennes en France (22 %). En 2012, la France était le 2e pays d’accueil des investissements créateurs d’emploi en provenance du Canada, derrière le Royaume-Uni.

Pour ce qui est des travailleurs détachés, l’accord prévoit qu’ils puissent rester – pour une durée maximale de trois ans- sous leur statut d’origine.

Un article prévoit aussi les conditions de la prise en compte par chacune des deux Parties des périodes accomplies dans des États tiers liés à la France et au Canada par un accord de sécurité sociale, si une totalisation existe aussi entre ces pays. Par exemple, le régime canadien de retraite étant différent du régime québécois, un travailleur français qui aura exercé à Montréal et à Toronto pourra faire valoir ses droits acquis à Montréal par l’assurance vieillesse de Ottawa ou celle de Paris, selon l’endroit où il liquidera sa pension**. Car ce qu’on oublie souvent dans l’expression « sécurité sociale », c’est qu’elle regroupe diverses branches: outre la santé, on y trouve les domaines de la vieillesse, du décès ou de l’invalidité notamment. Mais pas celui du chômage.

Les articles 24 à 30 prévoient les clauses traditionnelles relatives à l’assistance mutuelle et les échanges d’information entre les deux Parties ainsi qu’au règlement des différends et à l’institution d’une commission mixte chargée de suivre l’application de l’accord. Nul doute que l’article 26 retiendra l’attention des plus suspicieux lors de chaque nouveauté: il rend possible la communication de données à caractère personnel. Une communication jugée par le gouvernement français comme « indispensable pour l’ouverture, le calcul et la gestion de droits de sécurité sociale, mais aussi pour contrôler les éventuels cas de fraude. » Le site de la CNIL publie de son côté une carte indiquant un niveau de contrôle et de protection de données similaire entre la France et le Canada.

Au Canada, l’Accord que le sénat français va examiner jeudi prochain en première lecture sous forme de projet de loi a été déposé à la Chambre des communes le 8 mai 2013… moins de deux mois après la visite de Jean-Marc Ayrault.

Le projet de loi qui sera examiné le 16 février au sénat consiste en un article unique, visant à approuver le nouvel accord.

Le rapport remis il y a quelques jours par Hélène Conway-Mouret est consultable ici par chapitres. On peut également le télécharger dans son intégralité d’un simple clic.

Pour des détails plus historiques, lire sur Le JO au café.

* Dans ce contexte, on entend désormais par « français » non pas la personne de nationalité française (et ses ayants-droit) mais celle qui a cotisé au système français, comme salarié ou travailleur indépendant, ainsi que ses ayants-droit. L’accord de 1979 visait, lui, les ressortissants canadiens et les ressortissants français (lire ici l’article 1), et donc était plus restrictif.
** Lorsqu’en matière de sécurité sociale on parle du Canada, cela exclut le Québec, régi par un régime spécifique. C’est expliqué ici pour le Canada, et pour la France.

Une Réponse

  1. […] Québec soient plus rapidement transcrites dans les faits que l’accord franco-canadien, arrivé au sénat en février 2015, deux ans après sa signature en mars 2013 par Jean-Marc Ayrault (à […]

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